Isotrétinoïne et troubles psychiatriques

Isotrétinoïne et troubles psychiatriques

Message de la Société Française de Dermatologie

La question du risque psychiatrique de l’isotrétinoïne est régulièrement médiatisée, ce qui peut susciter l’inquiétude des patients et des familles. Ce document a été rédigé afin d’aider les dermatologues à répondre aux questions posées en consultation.

En juin 2022, le Centre de Preuves de la Société Française de Dermatologie (SFD) et le groupe thématique DEFI (Dermatoses Faciales), en lien avec l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM), ont réuni un groupe d’experts pour :

• Rappeler l’indication de l’isotrétinoïne dans l’acné : acné très sévère ou acné modérée à sévère en cas d’échec du traitement de première intention ;
• Souligner la nécessité de prendre en compte ses risques : évaluation du risque psychiatrique, contraception, surveillance biologique ;
• Préciser les indications hors Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) : acné sur phototype foncé, acné du bas du visage de la femme adulte, rosacée, dermite séborrhéique, hidradénite suppurée etc.

Les principales conclusions de ce séminaire ont été synthétisées dans un article qui sera publié dans les Annales de Dermatologie et Vénéréologie et dans les Annales de Dermatologie-FMC.

Concernant le risque psychiatrique, l’état des connaissances actuelles sur le sujet est rappelé :

1. L’analyse des cas français de pharmacovigilance a identifié 27 décès par suicide et 48 tentatives de suicide sous isotrétinoïne. De plus, l’existence d’un modèle de dépression induit par l’acide rétinoïque chez la souris témoigne de la plausibilité d’un risque propre aux rétinoïdes. Cependant, l’adolescence est une période de fragilité psychique et l’acné porte en elle-même un risque démontré de troubles psychiatriques ou de suicide (1).
2. À l’échelle populationnelle en France, l’analyse des conduites suicidaires de plus de 400 000 patients traités par isotrétinoïne ne retrouvait pas de risque propre à l’isotrétinoïne. De plus, en France comme en Suède et aux États-Unis, il n’y avait pas davantage de suicides et de tentatives de suicide sous ce traitement (2-4).
3. Il est également important de noter que chez les patients traités par isotrétinoïne pour d’autres pathologies inflammatoires, il n’a pas été observé de troubles de l’humeur ou de troubles du comportement, suggérant un rôle majeur de l’acné dans l’apparition de troubles psychiatriques.

Ainsi, les conditions actuelles d’utilisation de l’isotrétinoïne ne sont pas associées à un risque suicidaire dans les études populationnelles. Cependant, on ne peut exclure un risque individuel dont le mécanisme serait encore inconnu (hétérogénéité pharmaco-génomique ?). L’ensemble de ces données plaide pour poursuivre une surveillance particulière du risque psychiatrique (5). (https://document.sfdermato.org/publication/doi.org10.1111bjd.21764.2022.07.13_isotretinoin.pdf)

Aussi, informer le patient et les parents en amont du traitement et poursuivre la surveillance au cours du traitement reste essentiel. Pour formaliser la démarche et aider à ouvrir la discussion avec un adolescent, l’utilisation d’une échelle de dépression spécifique (Adolescent Depression Rating Scale) a été proposée (https://www.sfdermato.org/upload/scores/depression-de-ladolescent.pdf) (6).

Consultez également :

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Références : 

1. Xu S, Zhu Y, Hu H, Liu X, Li L, Yang B, et al. The analysis of acne increasing suicide risk. Medicine. 2021 ; 100 : e26035.
2. Sundström A, Alfredsson L, Sjölin-Forsberg G, Gerdén B, Bergman U, Jokinen J. Association of suicide attempts with acne and treatment with isotretinoin: Retrospective Swedish cohort study. BMJ. 2010 ; 341 :1090.
3. Droitcourt C, Nowak E, Rault C, Happe A, le Nautout B, Kerbrat S, et al. Risk of suicide attempt associated with isotretinoin: A nationwide cohort and nested case-time-control study. Int J Epidemiol. 2019; 48:1623–35.
4. Ugonabo N, Love E, Wong PW, Rieder EA, Orlow SJ, Kim RH, et al. Psychiatric disorders and suicidal behavior in patients with acne prescribed oral antibiotics versus isotretinoin: Analysis of a large commercial insurance claims database. J Am Acad Dermatol. 2021; 85:878–84.
5. Chosidow O, Beylot-Barry M, Corgibet F, Jouan N, Dupin N, Guillot B; Centre of Evidence of the French Society of Dermatology. Isotretinoin: reasserting its public health value at the population level, addressing potential neuropsychiatric risk at the individual level. Br J Dermatol 2022; 187:831-832.
6. 6. Hefez L, Micallef J, Revah-Levy A, Falissard B, Jouve E, Cribier B, et al. First use of the Adolescent Depression Rating Scale (ADRS) in the management of young people with severe acne treated with isotretinoin: a pilot study of an active monitoring of depressive disorders by dermatologists. Clin Exp Dermatol. 2022; 47:709–16

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